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05/05/22

Le refuge pour animaux de Gand remporte la bataille

Fin de l'insécurité juridique ?

Le refuge pour animaux de Gand remporte la bataille – ouverture pour mettre fin à l’incertitude juridique concernant les pratiques vétérinaires pouvant être effectuées par des assistants vétérinaires.

Le cabinet d’avocats Joost Van Damme est intervenu dans cette affaire pénale sensationnelle, qui s’est soldée par un acquittement des prévenus et qui pourrait être le début de la fin de l’insécurité juridique à laquelle sont confrontés les refuges pour animaux, au profit du bien-être animal (Corr.Rb. Gand, 17 septembre 2019, 15G035828).

Conformément à l’art. 4 de la loi du 28 août 1991, les actes vétérinaires ne peuvent être pratiqués que par des personnes physiques inscrites comme vétérinaires sur les listes de l’Ordre des vétérinaires. Cependant, l’art. 11 § 2, 1° de la loi du 28 août 1991 stipule que la personne « responsable » de l’animal peut détenir un dépôt de médicaments soumis à ordonnance, qu’il obtient soit sur ordonnance d’un vétérinaire, soit fourni par lui, pour poursuivre un traitement entamé selon les directives de ce vétérinaire. Le tribunal correctionnel a décidé que le ‘Responsable’ au sens de l’art. 1, 3° de la loi précitée (« le propriétaire ou le gardien qui exerce habituellement la gestion et la surveillance immédiates des animaux ») est le refuge pour animaux qui s’avère être le propriétaire de l’animal, afin que les employés du refuge reçoivent un traitement initié par le vétérinaire, en l’occurrence l’administration/l’injection de fluides (eau), ont pu le poursuivre sans s’exposer à des poursuites pénales.

Dans ce cas, l’asbl SOCIETE ROYALE DE PROTECTION DES ANIMAUX (le refuge pour animaux de Gand) avec son président (également vétérinaire permanent au refuge) et un employé ont été soupçonnés d’avoir commis ou co-perpétré l’infraction visée au 1) art. 541 SO. (tuer des chats de manière malveillante et douloureuse, attraper des chats en leur infligeant de la douleur, donner des coups de pied et frapper des chiens) (acte d’accusation A) ; 2) art. 1 j° art. 35 in fine de la loi du 14 août 1986 relative à la protection et au bien-être des animaux (tuer des chats par gazage lent au CO2, tuer des chiens avec une dose d’injection trop faible, mettre des animaux vivants au congélateur, euthanasier inutilement des animaux en bonne santé, battre les chiens et leur donner des coups de pied) (accusation B) ; 3) art. 4 § 1 j° art. 36, 3° Loi du 14 août 1986 relative à la protection et au bien-être des animaux (non-apport des soins nécessaires aux chiens et chats malades, non-apport d’eau fraîche et de nourriture aux chats, hébergement des chats dans de très petites cages si bien qu’ils sont en contact direct avec leurs excréments, enfermer des chiens dans des cages à peine nettoyées) (accusation C) ; et 4) art. 4 j° art. 20, 1.1° de la loi du 28 août 1991 relative à l’exercice de la médecine vétérinaire (sans être inscrit comme vétérinaire sur les listes de l’Ordre des Vétérinaires effectuer des actes vétérinaires non autorisés en vertu de l’art. 5, 6 et 7, à savoir : injection intracutanée de liquide à un chat atteint de grippe féline et euthanasier les chats) (accusation D).

La raison en était une plainte avec constitution de partie civile au nom d’une association qui s’occupe (principalement) de chats sur une péniche à Gand et qui agit en tant que représentant des intérêts des animaux. Comme le réclamait le Ministère Public, le refuge pour animaux, sa présidente et son employé ont été suspendus des poursuites par la chambre du conseil correctionnel pour les allégations de maltraitance animale (accusations A, B et C), alors que l’enquête judiciaire n’avait révélé aucun indice de culpabilité.

Les prévenus n’avaient qu’à se justifier devant le Tribunal correctionnel pour une prétendue violation de l’art. 4 j° art. 20, 1.1° de la loi du 28 août 1991 relative à l’exercice de la médecine vétérinaire (sans être inscrit comme vétérinaire sur les listes de l’Ordre des Vétérinaires effectuer des actes vétérinaires non autorisés en vertu de l’art. 5, 6 et 7, à savoir : injection intracutanée de liquide à un chat atteint de grippe féline et euthanasier les chats) (accusation D).

Le refuge pour animaux, le vétérinaire et un (ancien) employé du refuge ont tous été acquittés. Le verdict est devenu définitif et ne peut plus être contesté en appel.

L’objet de la procédure pénale dans la présente procédure concerne la problématique de la généralisation dans les refuges pour animaux de tout le pays de l’assistance par des employés (non vétérinaires) dans l’encadrement d’un vétérinaire (et/ou dans le cadre de la poursuite d’un traitement déjà entamé par le vétérinaire) effectuant des gestes simples comme l’application de liquide sous la peau, qui – dans une lecture (trop) rigide de la loi (contestée par les prévenus dans la présente procédure) – serait réservée à un vétérinaire agréé.

En tant que vétérinaire agréé, le deuxième défendeur ne pouvait enfreindre l’art. 4 j° art. 20, 1.1° de la loi du 28 août 1991 relative à l’exercice de la médecine vétérinaire, la qualité de vétérinaire étant constitutive de l’infraction qui s’y rapporte.  Dans la mesure où le deuxième prévenu a été poursuivi en tant que coauteur (art. 66 Sw.) pour les fois où l’employé co-persécuté du refuge aurait injecté du liquide sous-cutané à un chat, les défendeurs ont fait valoir que cela avait été fait sous sa supervision et faisait partie de la poursuite d’un traitement déjà entamé par le vétérinaire. Il s’agit d’ailleurs d’un acte largement pratiqué par les particuliers avec leurs propres animaux de compagnie. En pratique, il est courant qu’un vétérinaire demande que certaines actions se poursuivent à domicile.

En ce qui concerne la disponibilité des médicaments pour les assistants vétérinaires, il y a une base légale ; l’art. 11 § 1 et § 2, 1° de la loi du 28 août 1991 relatif à l’exercice de la médecine vétérinaire : « § 1. Sans préjudice des dispositions de l’article 12, le responsable ou l’assistant vétérinaire peut détenir des médicaments sans ordonnance ; § 2. Sans préjudice des dispositions de l’article 12, le responsable peut disposer d’un dépôt de médicaments soumis à ordonnance, qu’il obtient : 1° soit sur ordonnance d’un vétérinaire, soit remis par lui, afin de poursuivre un traitement entamé selon les instructions de ce vétérinaire (…) ». Le « responsable » est le propriétaire des animaux (en l’occurrence le refuge, cf. art. 1, 3° de la loi du 28 août 1991 relative à l’exercice de la médecine vétérinaire). Les animaux soignés au refuge de Gand sont la propriété du refuge (soit en vertu d’un acte de renonciation du propriétaire, soit sur la base de la convention avec la Ville de Gand. « L’humidité » n’est rien d’autre que de l’eau (H2O), c’est-à-dire un produit dispensé de prescription par sa nature.

C’est à juste titre que le tribunal a rejoint les défendeurs dans leur position selon laquelle le refuge qui s’avère être le propriétaire de l’animal peut également être qualifié de « responsable » au sens de l’art. 1, 3° de la loi sur l’exercice de la médecine vétérinaire, afin que les employés du refuge puissent poursuivre un traitement entamé par le vétérinaire, en l’occurrence l’administration/injection de fluides (eau), sans s’exposer à des poursuites pénales.

Les considérations du tribunal quant à savoir s’il s’agissait ou non d’une « situation exceptionnelle » (c’est-à-dire si les actes allégués par les aidants étaient l’exception plutôt que la règle) sont non pertinents – contrairement à ce que le tribunal semble supposer – à la lumière de la portée de l’art. 11 § 2, 1° de la loi du 28 août 1991.

Cette affaire s’inscrit dans un débat plus large concernant les pratiques vétérinaires autorisées. Chaque refuge pour animaux est associé à (au moins) un vétérinaire agréé. Compte tenu de la multitude d’animaux malades, cela pose un certain nombre de problèmes pratiques pour les refuges pour animaux. La multitude de chiens et de chats qui doivent être traités chaque semaine ne permet pas que toutes les actions (partielles) prises à cet effet soient effectuées exclusivement par le vétérinaire sans l’aide ou l’assistance d’employés formés (en interne ou en externe) qui ne sont pas enregistrés en tant que vétérinaires, mais exercent leurs fonctions d’assistance sous la supervision d’un vétérinaire tout au long du processus. Pour mémoire : selon le refuge pour animaux de Gand, 1769 animaux en moyenne sont amenés au refuge de Gand chaque année. En moyenne, les vétérinaires du refuge de Gand effectueraient 600 actes médicaux chaque mois (administrer des médicaments, vacciner, injecter des liquides, faire des prises de sang, micropuce, stériliser, euthanasier, opérer (par exemple, extraction dentaire et traitement d’urgence telles que les chats renversés). Sans compter la multitude de tâches périphériques prises en charge par les soignants : puces, élimination des tiques, application de pommades pour les oreilles et les yeux, etc. Comme le vétérinaire doit accomplir autant d’actes lorsqu’il est présent dans le refuge, les membres du personnel sont contraints d’accomplir des actes – dans le cadre du suivi des traitements, des soins et du contrôle des maladies chez les animaux – qui, dans une lecture trop stricte de la loi, ne devraient pouvoir être réalisés que par un vétérinaire (par exemple : administrer le liquide sous-cutané aux chats atteints de grippe féline, car il s’agit d’un traitement intensif qui nécessite plusieurs traitements par jour).

La question se pose donc de savoir pourquoi le Roi, en application de l’art. 7 de la loi du 28 août 1991 relative à l’exercice de la médecine vétérinaire, n’a pas encore dressé la liste des actes pouvant être accomplis par les auxiliaires vétérinaires (« Par dérogation à l’article 4, le Roi peut, après avis du Haut Conseil de l’Ordre des vétérinaires, établir la liste des actes vétérinaires que les auxiliaires vétérinaires peuvent effectuer ainsi que les conditions à respecter (…) »). Peut-être que l’Ordre des Vétérinaires hésite par un éventuel réflexe corporatiste. En ce qui concerne la situation comparable dans laquelle les employés de laboratoire injectent des animaux de laboratoire/test (art. 3 de l’arrêté royal en date du 13 septembre 2004 modifiant l’arrêté royal du 14 novembre 1993 relatif à la protection des animaux d’expérience, en ce qui concerne la formation des personnes effectuant des expériences sur animaux, y participant ou assurant les soins aux animaux utilisés à des fins expérimentales, B.S. 21 octobre 2004), cela s’est néanmoins produit, alors que ces situations ne sont essentiellement pas différentes. Les employés du refuge pour animaux sont également formés, font régulièrement des formations continues et opèrent sous la supervision d’un vétérinaire agréé.

Dresser la liste des actes vétérinaires pouvant être réalisés par les auxiliaires vétérinaires en application de l’art. 7 de la loi du 28 août 1991 relative à l’exercice de la médecine vétérinaire reviendrait à codifier une pratique déjà largement répandue et mettrait fin à l’insécurité juridique actuelle.

Voici les passages pertinents du jugement du tribunal correctionnel, rendu dans l’affaire pénale dans laquelle le bureau a assisté le vétérinaire du refuge pour animaux de Gand :

« (…) Le deuxième prévenu est vétérinaire et est autorisé à exercer la médecine vétérinaire en Belgique. L’affirmation du second défendeur selon laquelle, en tant que vétérinaire, il ne peut enfreindre l’article 4 de la loi du 28 août 1991 relative à l’exercice de la médecine vétérinaire est fondée. Cela ne l’empêche pas d’être poursuivi en tant que complice du troisième prévenu qui n’est pas vétérinaire et qui a commis des actes matériels.

Le deuxième prévenu ne peut donc être condamné comme complice que si le troisième prévenu a commis une infraction pénale.

acte d’accusation D.1.

Au vu des images vidéo remises au juge d’instruction à l’occasion de la plainte au civil et des aveux du troisième prévenu en ce sens, il ne fait aucun doute que le troisième prévenu a administré une injection sous-cutanée à un chat atteint de grippe féline le 6 novembre 2015.

Il ne saurait non plus être contesté, au vu des déclarations du troisième prévenu et des aveux du second prévenu, que le second prévenu a permis au troisième prévenu de réaliser ce geste.

L’article 3 de la loi du 28 août 1991 définit comme acte vétérinaire, entre autres :

« 4° mise en place et réalisation d’un traitement » ;

« 10° l’euthanasie des animaux ».

Les actes allégués par le troisième défendeur sont des actes vétérinaires au sens de la loi du 28 août 1991.

Conformément à l’article 4 de la loi du 28 août 1991, les actes vétérinaires ne peuvent être pratiqués que par des personnes physiques inscrites comme vétérinaires sur les listes de l’Ordre des vétérinaires.

Conformément à l’article 11 § 2, 1° de la loi du 28 août 1991, la personne responsable peut détenir un dépôt de médicaments soumis à ordonnance, qu’il obtient soit sur ordonnance d’un vétérinaire, soit fourni par lui, pour poursuivre un traitement entamé selon les directives de ce vétérinaire.

Il peut être déduit de cet article que, par dérogation à l’article 4, la personne responsable peut administrer des médicaments pour poursuivre un traitement entamé selon les instructions de ce vétérinaire.

En tant que responsable, l’art. 1, 3° de la loi du 28 août 1991 définit « le propriétaire ou le gardien qui exerce habituellement la gestion et la surveillance immédiates des animaux ».

L’article 9 de la loi du 14 août 1986 relative à la protection et au bien-être des animaux prévoit qu’un animal confié à un refuge pour animaux par une collectivité communale doit être tenu à la disposition de son propriétaire pendant au moins quinze jours. Passé ce délai, le détenteur de l’animal devient propriétaire de cet animal de plein droit. Lorsque des animaux sont donnés par des particuliers, ces derniers doivent signer un acte de renonciation. Il n’est pas clair si les animaux en question ont été confiés par le conseil communal ou par un particulier, ni quand cela s’est produit. Ce manque de clarté doit être interprété en faveur des prévenus, si bien que le tribunal présume que le premier prévenu était le propriétaire de fait des animaux au moment des faits.

Le premier défendeur était donc en droit d’administrer des médicaments à l’animal afin de poursuivre un traitement entamé, selon les instructions de ce vétérinaire.

Le troisième prévenu était un employé du premier prévenu au moment des faits. Comme la personne morale ne peut pas accomplir d’actes physiques, elle peut les faire exécuter par son ou ses employés/sa ou ses personnes désignées. Le troisième prévenu, en tant qu’employé du premier prévenu, avait le droit d’administrer des médicaments pour poursuivre un traitement entamé (y compris une (nouvelle) injection sous-cutanée de liquides dans des cas exceptionnels) selon les instructions de ce vétérinaire.

Le tribunal souligne qu’il ne peut être déduit avec certitude du dossier pénal que dans la plupart des cas ce n’était pas le vétérinaire mais le ou les employés qui auraient administré du liquide sous-cutané par injection. Il ressort des déclarations des deuxième et troisième prévenus qu’il s’agissait plutôt d’une situation exceptionnelle et que, sauf situations exceptionnelles, le deuxième prévenu a toujours administré lui-même des liquides sous-cutanés au moyen d’une injection.

Le dossier pénal ne contient aucun élément permettant de présumer que l’injection administrée par le troisième prévenu le 5 novembre 2015 à un chat atteint de grippe féline ne faisait pas partie d’un traitement entamé par le deuxième prévenu, ni qu’elle n’a pas été réalisée conformément aux indications du deuxième prévenu, ni qu’il ne s’agissait pas d’une situation exceptionnelle.

Le troisième accusé doit être acquitté de cette accusation. Les premier et deuxième accusés doivent donc également être acquittés.

acte d’accusation D.2.

(…) »

Par ces motifs, (…) :

le tribunal, faisant droit en contradiction, PÉNAL (…)

Acquitte les accusés des charges D.1 et D.2.

(voir aussi C. PEIRE dans TGR-TWVR 2019, afl. 3, 175-176)